nov
04
2016

Exclusif. Fatou Bensouda: « Le Burundi est dans l’obligation de coopérer avec la CPI jusqu’en octobre 2017 »

Bruxelles – « L’article 127 du Statut de Rome est clair. Le retrait d’un État ne le dégage pas automatiquement de ses obligations vis-à-vis de la Cour. Concrètement, jusqu’au 27 octobre 2017 au moins, les autorités du Burundi devront assumer leurs obligations incombant du Statut ». C’est ce que déclare Fatou Bensouda dans un entretien exclusif accordé par téléphone depuis Ottawa à l’agence Infos Grands Lacs. C’est la première fois que la Procureure générale de la CPI s’exprime sur la loi portant sur le retrait du Burundi du Statut de Rome, adoptée à une majorité écrasante par l’Assemblée nationale et le Sénat et promulguée le 18 octobre par le président de la République burundaise, Pierre Nkurunziza.

« Les autorités du Burundi seraient aussi tenues de coopérer avec toute enquête que mon Bureau pourrait initier avant le retrait du Burundi de la CPI et avec toute poursuite qui pourrait en résulter », ajoute Bensouda.

Celle du Burundi est une « décision souveraine d’un Etat », reconnait la Procureure générale de la CPI, mais « se retirer de la première cour pénale internationale universelle et permanente risque de priver le Burundi de la possibilité de prévenir la commission de crimes internationaux et de lutter contre l’impunité de leurs auteurs ». Mais Fatou Bensouda ne compte pas désarmer si facilement. D’ici fin octobre 2017, « mon bureau continuera à analyser la situation au Burundi dans le cadre de l’examen préliminaire dont j’ai annoncé l’ouverture le 25 avril 2016. L’examen préliminaire pourra prendra en compte tout acte ou crime présumé qui se produirait au Burundi dans les douze mois qui viennent ».

L’examen préliminaire ouvert par la Procureure le 26 avril 2016 porte sur la situation qui prévaut au Burundi depuis avril 2015 sur les crimes et les violences commises dans ce pays depuis avril 2015. « Nous considérons que nous disposons d’un délai d’au moins un an pour mener à bien cet examen et ouvrir une enquête si telle est la conclusion qui s’impose », souligne Bensouda.

Au cours de cette interview exclusive à IGL, l’ex avocate gambienne s’exprime sur le sort du journaliste burundais, Jean Bigirimana, porté disparu au Burundi depuis le mois de juillet. « Le cas de Jean Bigirimana comme celui de nombreuses autres personnes portées disparues me préoccupe bien évidement », déclare la Procureure de la CPI. « L’examen préliminaire que mène mon Bureau se penche notamment sur de nombreux cas présumés de disparitions ou de meurtres inexpliqués. Nous cherchons à déterminer si les informations à ce sujet sont crédibles et confirmées, si ces affaires relèvent de la compétence de la CPI et si elles font l’objet d’enquêtes fiables et sérieuses par les autorités burundaises ». Dans le cas contraire, « j’ai toujours la possibilité d’ouvrir une enquête au Burundi conformément aux critères du Statut de Rome ».

Bref, Bujumbura n’est pas à l’abri d’une enquête que le bureau de la Procureure pourrait décider de mener au Burundi et à laquelle les autorités burundaises seraient tenues de collaborer. Reste à savoir si et quand Fatou Bensouda deécidera de l’ouvrir, et quelles en seront les conséquences sachant que le retrait du Burundi de la CPI sera définitif le 27 octobre 2017.

Eentretien réalisé par Joshua Massarenti pour Infos Grands Lacs, en collaboration avec VITA/Afronline (Italie). 

 

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00:05:30

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