oct
07
2015

Dr Bizimana Jean Damascène (CNLG):"L’Abbé Wenceslas Munyeshyaka est impliqué dans le génocide individuellement"

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Dr BIZIMANA Jean Damascène/ Secrétaire Exécutif CNLG

Dans un communiqué de presse rendu public par la Commission Nationale de Lutte contre le Génocide (CNLG), cet organe « condamne avec énergie le non-lieu au bénéfice du prêtre Munyeshyaka Wenceslas ». Déclaration signée Dr Bizimana Jean Damascène, Secrétaire Exécutif de la CNLG :

Encore une fois, la justice française vient de marquer son point dans le soutien aux principales personnes impliquées directement dans le génocide perpétré contre les Tutsi. En effet, après les réquisitions d’un non-lieu du parquet de Paris, le 19/8/2015, c’est le tour du tribunal correctionnel de prononcer un non-lieu au bénéfice du prêtre Wenceslas Munyeshyaka.

Il faut ici rappeler que l’abbé Wenceslas MUNYESHYAKA est impliqué dans le génocide individuellement en tant que responsable du crime de génocide pour avoir planifié, incité à commettre, commis ou de toute autre manière aidé et encouragé des gens à planifier, préparer ou exécuter le génocide contre les Tutsi.

Le non-lieu en faveur de Munyeshyaka Wenceslas est un non-sens au regard du droit et de la justice. Une telle décision met à nu une justice française qui se dit indépendante, mais qui joue la protectrice d’une classe politique et militaire dont le rôle a conduit au génocide de plus d’un million de Tutsi non seulement en 1994, mais aussi entre 1990 et 1993 où la France  a soutenu politiquement, financièrement, militairement et diplomatiquement un régime criminel notoire.

Dans la présente affaire, rappelons que la France s’était précipitée à demander le transfert des affaires Munyeshyaka et Bucyibaruta, et que le manque de volonté de juger l’affaire Munyeshyak avait conduit la France à être condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme en 2004 pour non respect d’un jugement dans des délais raisonnables.

En somme, pour la CNLG, ce prononcé de non lieu est une véritable comédie judiciaire teintée de négationnisme, et il ne fait que présager l’impunité et l’acquittement futur de plusieurs génocidaires qui se sont installés confortablement sur le sol français depuis 1994, avec l’octroi de la nationalité française pour plusieurs d’entre eux, qui devient l’un des prétextes majeurs de refus de les extrader vers le Rwanda.

Il est tout autant illogique que la France refuse systématiquement d’extrader des présumés génocidaires vers le Rwanda en arguant que le crime de génocide n’était pas réprimé au Rwanda en 1994. En effet, comment les régimes rwandais de Kayibanda ou de Habyarimana pouvaient-ils sanctionner le crime qu’ils commettaient eux-mêmes depuis 1959 ?

De même, une telle justification n’a aucune assise juridique puisque la loi française n° 96-432 du 22 mai 1996 portant adaptation de la législation française aux dispositions de la résolution 955 du Conseil de sécurité des Nations unies instituant un tribunal international en vue de juger les personnes présumées responsables d'actes de génocide ou d'autres violations graves du droit international humanitaire commis en 1994 sur le territoire du Rwanda et, s'agissant des citoyens rwandais, sur le territoire d'Etats voisins intègre dans le Code pénal français toutes les infractions incluses dans le Statut du TPIR. Or, le statut de cette juridiction établit que sa compétence temporelle se situe entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994 au Rwanda ou sur le territoire d’Etats voisins.

Son article 1er dispose : « Pour l'application de la résolution 955 du Conseil de sécurité des Nations unies du 8 novembre 1994 instituant un tribunal international en vue de juger les personnes présumées responsables d'actes de génocide ou d'autres violations graves du droit international humanitaire commis sur le territoire du Rwanda, ainsi que les citoyens rwandais présumés responsables de tels actes ou violations commis sur le territoire d'Etats voisins, entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994, la France participe à la répression des infractions et coopère avec cette juridiction dans les conditions fixées par la présente loi. »

Donc, en intégrant le Statut du TPIR dans sa propre législation, la France a automatiquement reconnu que le génocide commis contre les Tutsi peut être jugé par ses tribunaux ou par les tribunaux de tout autre Etat dans lequel elle extraderait des génocidaires présumés. Rien n’empêche donc la justice française d’extrader ou de juger des génocidaires présumés vers le Rwanda, si ce n’est des motifs politiques et pas juridiques.

La CNLG encourage les parties civiles à interjeter l’appel contre l’ordonnance de non-lieu du juge d’instruction dans l’affaire Wenceslas Munyeshyaka, et condamne une fois de plus une aberrante décision qui fait honte à la justice et au droit.

Source : CNLG 

 

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