Engrais chimiques : leur utilisation croît, mais reste toujours faible
La consommation d’engrais chimiques a augmenté de manière significative au Burundi pour améliorer le rendement agricole mais, il y a encore du pain sur la planche pour atteindre l’autosuffisance alimentaire.
Les taux d’utilisation des engrais en Afrique sont les plus bas du monde. En conséquence, les rendements des cultures ont stagné au cours des 45 dernières années, provoquant l’insécurité alimentaire. Et, avec l’augmentation des superficies emblavées, la déforestation s’en est suivie. En raison de la forte pression démographique, les agriculteurs ont dû abandonner les jachères. Ce qui a entraîné l’épuisement des sols sur le continent. Avec 65% de la population active dans l’agriculture, les impacts généralisés de la faible productivité agricole de l’Afrique incluent la pauvreté continue, la dépendance sur les importations alimentaires, les faibles niveaux d’investissement et finalement, l’instabilité politique.
En 2006, lors du Sommet africain sur les engrais chimiques, les ministres de l’Agriculture de l’Union africaine s’étaient fixé comme objectif d’atteindre 50 kg de fertilisants par hectare en moyenne d’ici à 2015 (contre plus de 120 kg en moyenne dans le monde). En 2017, avec moins de 14 kg par hectare, on en était encore très loin.
Le Burundi a rejoint les autres pays africains dans la quête de l’augmentation de la production par l’utilisation des engrais chimiques pour améliorer son rendement agricole. Des mesures urgentes ont été prises pour atteindre cet objectif.
La PNSEB et ses réalisations
Avant, la mise en place du PNSED (Programme National de Subvention des Engrais du Burundi), il y avait un système national d’approvisionnement en engrais. Et c’est le ministère en charge de l’agriculture qui les distribuait via les agronomes communaux. C’était une petite quantité. On ne parvenait pas à satisfaire la demande, explique Ir Prosper Dodiko, Directeur de la Fertilisation des sols et Coordonnateur du PNSEB.
« Le PNSED a commencé en 2013 et, avec la création de ce programme, on a passé de 7700 à 50 100 tonnes d’engrais chimiques. Donc la quantité a été multipliée par sept. Ir Dodiko explique qu’avec le PNSEB, la méthodologie d’approvisionnement et de distribution des engrais a changé : « Le ministère a ouvert le marché des fertilisants aux privés. Non seulement le secteur privé importe mais aussi c’est le secteur privé qui distribue les engrais. Les prix qui sont proposés aux agriculteurs ont diminué de 40%. Ils paient les 60% restants. Auparavant, on distribuait les engrais aux agri-éleveurs mais, aujourd’hui ce sont eux qui commandent les engrais chimiques dont ils ont besoin. On importe selon la quantité demandée ».
La rentabilité de l’utilisation des engrais chimiques
Certes, les engrais chimiques permettent d’obtenir un plus grand rendement agricole, mais comme l’explique Ir Dodiko, ils ne sont utiles que lorsqu’ils sont combinés avec la fumure organique : « Chacun des deux joue son rôle : les engrais chimiques fournissent les éléments nutritifs nécessaires au développement des plantes tandis que la fumure organique va aider à maintenir ces éléments nutritifs pour qu’ils soient utilisés par la plante ».
Des augmentations de rendement importantes peuvent être obtenues lorsque les engrais inorganiques sont utilisés. L’augmentation du rendement du maïs due à l’application du NPK (azote, phosphore, potassium) peut atteindre 150% mais lorsque le sol est amendé avec la chaux et du fumier, le rendement est de 184% (d’après les études faites en Afrique de l’Est et du Sud)
L’augmentation de la production de biomasse aide à augmenter la teneur en carbone organique du sol.
Le sol burundais se dégrade de plus en plus
Le sol est pauvre en raison de sa vieillesse et est encore dépouillé de la végétation.
« La balance nutritive du sol burundais est déficitaire. La plupart des macro éléments dont le sol a besoin sont insuffisants notamment l’azote, le phosphore et le potassium. Les petits micronutriments peuvent aussi nécessaires être ajoutés.», lance Ir Dodiko
Donc la non-utilisation des engrais chimiques a un effet négatif plus important sur la rentabilité que son utilisation.
Des perspectives d’avenir….
Le ministère de l’Environnement, de l’Agriculture et de l’Elevage a encouragé le secteur privé à investir dans les engrais chimiques. C’est ainsi qu’une usine en cours de construction va produire localement des engrais chimiques dont les agriculteurs auront besoin, signale Ir Dodiko.
Il affirme qu’au plus tard l’année prochaine, il y aura la première sortie des engrais chimiques produits localement. «Lorsque nous avons fait la cartographie du sol, nous avons constaté que nous avons besoin de micronutriment. Nous avons alors prévu que lorsque l’usine aura commencé la fabrication des engrais, on passera à l’utilisation des engrais chimiques complexes où sont englobés tous les éléments ».
Nous allons changer les engrais qu’on utilise et promouvoir l’utilisation de la dolomie pour corriger l’acidité du sol en appliquant une subvention plus élevée parce que nous avons constaté que nous avons 27% de sols acides, continue-t-il.
L’engrais chimique n’est une panacée pour tous les nombreux problèmes qui affligent l’agriculture burundaise. La promotion des engrais en dehors d’autres actions n’aura pas un impact durable. Des politiques et des programmes spécifiques sont donc nécessaires pour encourager l’utilisation des engrais d’une manière techniquement efficace, économiquement rationnelle et favorable au marché.
Les décideurs politiques et les partenaires au développement doivent travailler de concert pour identifier et mettre en œuvre des interventions visant à résoudre les problèmes structurels sous-jacents qui sapent les incitations aux agriculteurs à utiliser les engrais chimiques et aux entreprises à les fournir.
Signalons qu’au Burundi, on utilise quatre types d’engrais chimiques à savoir : le DAP, l’Urée, le KCL et le NPK (17-17-17).
burundi-eco.com