oct
23
2021

« Plus jamais ça » ou plus jamais ici ?

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Florence Rutamuceru : « Des hutu nous ont cachés et nous ont soignés. Nous rendons également hommage à ceux qui ont sauvé les victimes ! »

La commémoration du 28ème anniversaire de l’assassinant d’une centaine de lycéens de Kibimba a été célébrée dans l’anonymat presque total. Dix personnes étaient seulement autorisées à assister à ces cérémonies. L’association AC-Génocide Cirimoso crie à la discrimination.

Dès ce matin 21 octobre, le monument de Kwibubu où fut brûlé vif 150 élèves Tutsi du Lycée de Kibimba, était presque désert. Juste quelques chaises en plastique sur ces lieux, pas de tentes, encore moins de cérémonies grandioses, comme dans les années passées lors de la commémoration de l’assassinat de ces élèves, devenus le symbole de milliers de Burundais massacres à travers tout le pays suite à l’assassinat du premier président démocratiquement élu au Burundi.

Les hommes en uniformes empêchaient toute personne qui chercherait à s’y approcher. Au lieu des centaines de rescapés, parents des élèves et les associations militant contre le génocide qui y convergeaient pendant cette journée, une délégation de dix personnes seulement venues de Bujumbura a eu droit dy accéder pour la commémoration.

Sauf la pose de 4 gerbes de fleurs et quelques discours sur ce lieu presque vide, les activités étaient largement simplifiées. Il y a eu une courte homélie de l’Abbé Claver Nzeyimana : « Se recueillir sur le mémorial de Kwibubu n’est pas d’attiser la haine et la vengeance mais plutôt pour apaiser les esprits de ceux qui ont perdu les leurs et aussi permettre aux assassins de se repentir ».

S’appuyant sur l’évangile de Matthieu qui empêche quelqu’un de se faire justice, il en appelle de réserver le jugement à Dieu. « Tu ne tueras point, celui qui tuera mérite d’être puni par les juges. Quiconque se met en colère contre son frère mérite d’être puni par les juges », a-t-il enseigné.

Tous ceux qui ont pris la parole ont fait savoir que la commémoration permet d’aborder les valeurs fondatrices de l’humanisme : la dignité de la personne ou le respect de la vie d’autrui.

« Commémorer l’assassinat des élèves de Kibimba et tous ceux qui ont péri dans la tragédie de 1993 est l’occasion de rappeler à la mémoire collective les cicatrices et les conséquences du génocide ».

« Nous ne sommes pas ici pour la vengeance ! »

Pose de gerbe de fleurs

Selon les organisateurs de ces cérémonies, il ne faut pas que les gens comparent ce mémorial et les commémorations qui s’y font quand elles ne sont pas interdites, comme outil de vengeance ou de haine.

Nous ne visons jamais une ethnie quelconque, tout ce que nous demandons c’est la justice pour toutes les victimes qui ont été tués sauvagement pour leurs idées, ethnies ou appartenances politiques.

« Des hutu nous ont cachés et nous ont soignés. Nous rendons également hommage à ceux qui ont sauvé les victimes », a indiqué Florence Rutamuceru, présidente de lassociation des rescapés. Aussi, a-t-elle ajouté, nous soulignons le rôle et la contribution de l’Etat Burundais et de la Communauté internationale dans la lutte et la prévention du génocide.

« La commémoration sensibilise au danger que représentent les préjugés, la haine, les extrémistes, ainsi que le non-respect des droits de l’Homme », a souligné Simon Suguru, représentant des parents des élèves de Kibimba assassinés.

Pour le Professeur Lothaire Niyonkuru, président de l’association AC Génocide- Cirimoso, seule la vraie justice pourra libérer le Burundi des crises répétitives qui engloutissent la vie des milliers d’innocents.

Selon lui, quand une partie de la population ou un groupe quelconque est discriminé dans ses droits fondamentaux, c’est là où naissent les frustrations et les violences.

« L’année passée, cétait l’insécurité invoquée pour nous interdire de venir nous recueillir ici, aujourd’hui, c’est la covid-19 qui est la cause de ne pas commémorer comme l’avons souhaité. Mais partout ailleurs, nous observons des rassemblements, des commémorations de tel ou tel évènement. Quand c’est Kibimba des raisons pour nous interdire ne manquent pas », a-t-il déploré avant de clôturer cette commémoration symbolique.

 
 
 

 

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