Commission Diène : « Une situation désastreuse »
Dans une conférence de presse virtuelle de ce jeudi 16 septembre, la commission d’enquête sur le Burundi confirme la persistance des violations graves des droits de l’Homme malgré les promesses initiales du président Ndayishimiye.
Un document de 54 pages. La commission d’enquête des Nations Unies sur le Burundi n’est pas tendre dans son cinquième rapport. L’espace démocratique étroitement fermé, arrestations, détentions arbitraires, tortures, exécutions et disparitions forcées … la liste des violations graves des droits de l’Homme est bien longue. Pour cette commission, « le calme de façade » qui règne au Burundi masque en fait une situation qui reste très préoccupante.
« Malgré les promesses du président Ndayishimiye d’améliorer durablement la situation des droits de l’Homme, seuls des gestes symboliques qui sont importants et appréciés et quelques mesures controversées ont été posés. Ces gestes et mesures ne sont pas suffisants en eux-mêmes. Ils ne visent pas à garantir le respect des libertés fondamentales notamment la liberté d’expression, d’information et d’association, » a déclaré le président de la Commission, Doudou Diène.
Les victimes de ces violations sont généralement toute voix dissonante, essentiellement les membres du parti de l’opposition et leurs proches ainsi que les ex-FAB.
La commission cite l’exemple de nombreuses violations graves des droits de la personne en lien avec de multiples attaques armées qui ont eu lieu depuis août 2020. Lors de la recherche des personnes soupçonnées d’être impliquées dans ces attaques armées ou collaborant avec des groupes rebelles, les forces de sécurité ont ciblé principalement des membres du principal parti d’opposition, le Congrès national pour la liberté (CNL), d’anciens membres des Forces armées burundaises (ex-FAB) dominées par les Tutsis ainsi que des rapatriés.
Les agents du SNR et des Imbonerakure indexés
Le rapport de la commission Diène pointe du doigt ceux qui sont à l’origine des violations graves des droits de l’homme, dont certaines pourraient constituer des crimes contre l’humanité. Il s’agit essentiellement des agents du Service national de renseignement (SNR), des policiers – y compris des Groupes mobiles d’intervention rapide (GMIR) – et des Imbonerakure.
« Ils continuent de bénéficier d’une impunité généralisée pour leurs actions, comme c’est le cas depuis 2015. La lutte contre la criminalité et le terrorisme doit être menée dans le respect des droits de l’Homme», a déclaré de son côté la commissaire Françoise Hampson depuis Londres.
Elle a, par ailleurs, indiqué que l’État de droit au Burundi continue de s’éroder malgré l’intention déclarée du Président Ndayishimiye de le restaurer : « Lorsque les décisions du gouvernement sont prises arbitrairement, même à des fins positives, cela a une influence globalement corruptrice. On ne peut pas non plus compter sur le pouvoir judiciaire pour prévenir ou remédier aux violations des droits de l’Homme. Notre rapport montre comment l’exécutif n’a fait que renforcer son contrôle de la justice sous la nouvelle administration.»
La Commission d’enquête sur le Burundi doit présenter son rapport final lors d’un dialogue interactif avec le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies le 23 septembre 2021.
Créée en septembre 2016, la commission d’enquête des Nations Unies sur le Burundi a été quasiment le seul mécanisme international indépendant à documenter et rapporter les violations des droits de l’homme au Burundi. Cinq ans après sa création, le renouvellement de son mandat est tout au plus incertain. Le gouvernement burundais s’oppose totalement à cette commission d’enquête, et a d’ailleurs refusé de coopérer avec elle depuis sa création.
Un défenseur des droits de l’Homme a indiqué à Iwacu : « On sait à 99% que la commission ne sera pas renouvelée. L’Union européenne ne soutient pas son renouvellement.»
https://www.iwacu-burundi.org/commission-diene-une-situation-desastreuse/