Covid-19 : « Mettez vos masques, la police est là ! »
Il s’observe un relâchement dans les mesures de prévention contre la covid-19 dans le transport en commun où le port du masque est obligatoire. Mais la plupart des passagers ne portent les masques que par peur des amendes de la police.
Il n’est pas rare de voir après le contrôle de la police dans les bus, bons nombre de passagers, en règle avec le port du masque à cet instant précis, d’un mouvement collectif synchronisé, ôter ou placer au niveau du menton cet accessoire, ’’gênant avec cette chaleur de Bujumbura’’, comme se le chuchotent ces passagers. Un geste qui en dit long.
Le chauffeur ou le convoyeur ne donnera l’alerte qu’au prochain contrôle «Il faut mettre vos masques, la police est encore là ! » Cette alerte que donnent les chauffeurs de bus ou les convoyeurs aux passagers quand ils aperçoivent des agents de roulage est devenue monnaie courante, banale,… à tel point que ceux qui s’obstinent à le garder passent pour des marginaux.
Depuis peu, la police s’est impliquée dans le contrôle du port de masque dans le transport en commun. Sur toutes les artères cahoteuses de Bujumbura.
Des passagers qui n’ont pas de masque, sont obligés de payer une amende de 5.000 francs burundais, selon les conducteurs des bus et les passagers. « Mais ces derniers n’ont pas peur d’attraper la covid-19, ils ont plus peur de payer cette amende exigée », confie une passagère avec un cache-nez correctement en place. Elle révèle que c’est une infirmière.
Les personnes qui utilisent le transport en commun pour aller vaquer à leurs occupations semblent trouver une solution, si l’un d’entre eux n’a pas de masque et qu’un autre en a deux, il y a une solidarité spontanée, instinctive qui est activée. Ce dernier lui prête son masque de réserve, juste le temps du contrôle policier.
« Je ne peux pas accepter que mon ami se fasse arrêter alors que j’en ai deux. Il faut s’entraider et espérer qu’il ne va pas me filer la covid-19 parce qu’il doit me remettre mon cache-nez », laisse entendre le bon Samaritain.
Ces passagers accusent les policiers de profiter de ces contrôles pour leur soutirer de l’argent : « Comment expliquer que porter un masque dans un bus c’est se protéger contre le coronavirus alors que la plupart des gens ne le portent pas convenablement ? », se demande un passager remonté.
Il reprend son souffle et continue son réquisitoire: « Ils les portent au niveau de leur menton voire sur le front ou au niveau du cou. » Avant, raconte-t-il, la police contrôlait les cartes d’identités, et les documents du véhicule mais aujourd’hui si tous les passagers sont en ordre avec les cartes d’identités, ces agents passent au contre des masques.
« C’est pour trouver le moyen de nous soutirer de l’argent. Heureusement que les gens s’arrangent pour être en ordre vis-à-vis des policiers, … et du coronavirus », lâche un autre passager.
«Il faut 10.000 BIF, sinon je t’embarque»
Il est 20 heures, dans un bus en provenance des quartiers du nord de Bujumbura, certains passagers portent des masques au niveau du menton, d’autres n’en ont pas. Il y en a qui confient qu’ils leurs masques dans leurs poches ou leurs sacs.
A la barrière se trouvant au niveau du pont sur la Ntahangwa, les passagers qui n’ont pas de masque commencent à paniquer. Mais après une courte discussion entre le chauffeur et les policiers, ces agents dégagent les concertinas de la route et laissent le bus passer.
Mais à quelques mètres de là, à l’avenue de l’Imprimerie, sur un autre point de contrôle, les policiers sont intransigeants. Ils tiennent à vérifier si tous les passagers ont mis leur masque. « Portez vos masques, la police nous arrête », lance le chauffeur à ses passagers.
Et c’est là que tout le monde commence à chercher son masque et sa carte d’identité. Le policier repère un passager qui n’a pas de masque. Il oublie vite le contrôle des identités pour s’occuper de ce passager. Il lui intime l’ordre de sortir du bus et demande au chauffeur de partir sans ce client ’’fautif’’.
Sans quittance, il lui demande de l’argent : « Il m’a menacé me disant qu’il peut m’envoyer en prison. Je l’ai supplié de me pardonner mais il a refusé. Il m’a dit que je dois lui donner 10.000 francs burundais pour me laisser partir. Je lui ai proposé 2.000 francs burundais, il a commencé à négocier mais au finish il a accepté le petit billet de 2000 francs burundais», confie-t-il avant de prendre un autre bus.
Désiré Nduwimana, porte-parole de la Police Nationale rejette ces allégations : « La police burundaise est exemplaire, cet argent qu’elle demande ce n’est pas de la corruption mais une amende collée aux personnes qui ne portent pas de masque », explique-t-il.
Et ironiquement, presque tous usagers des bus le disent : « On se demande si le port du masque obligatoire dans le transport en commun, est pour se protéger contre la covid-19 ou un moyen de ne pas se faire arrêter par la police, devenue sévère ces derniers temps».
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