La CPI autorise l’ouverture d’une enquête sur le Burundi
La Chambre préliminaire III de la Cour pénale internationale a autorisé la procureure Fatou Bensouda d’ouvrir une enquête. Un coup dur pour Bujumbura.
Composée des juges Chang-ho Chung, Antoine Kesia-Mbe Mindua et Raul C. Pangalangan, cette Chambre a jugé que les éléments justificatifs présentés par la procureure de la CPI donnent une base raisonnable pour mener une enquête. Elle concerne les crimes contre l’humanité qui auraient été commis à partir du 26 avril 2015 au moins au Burundi et, dans certains cas, à l’extérieur du pays par des ressortissants burundais.
La CPI estime que plus de 1 200 personnes auraient été tuées. Elle chiffre les détentions illégales ainsi que les disparitions par milliers. Les disparitions s’évalueraient par centaines. Les violences alléguées auraient entraîné le déplacement de 413 490 personnes entre avril 2015 et mai 2017.
Selon cette cour, ces crimes auraient été commis par des agents de l’État dont la police, le Service national de renseignement, des unités de l’armée burundaise et conjointement avec des membres des Imbonerakure, ligue des jeunes du parti au pouvoir.
Quid de la compétence de la CPI ?
La procureure est donc autorisée à étendre son enquête à des crimes perpétrés avant le 26 avril 2015 ou se poursuivant après le 26 octobre 2017, si certaines conditions juridiques sont remplies.
Selon le communiqué de cette cour de la Haye, la Chambre préliminaire III a, dans un premier temps, rendu sa décision sous scellés, le 25 octobre 2017. Elle a accepté à titre exceptionnel que la procédure relative à la demande d’autorisation d’enquêter soit menée sous scellés avec la participation du seul procureur.
Malgré le retrait définitif du Burundi de la CPI, cette cour demeure néanmoins compétente, selon elle. Ce, à l’égard de tout crime commis jusqu’au 26 octobre 2017 inclus. « Elle peut donc exercer sa compétence même après que ce retrait a pris effet dès lors que l’enquête ou les poursuites portent sur les crimes qui auraient été commis à l’époque où le Burundi était un État partie au Statut de Rome. »
En outre, la CPI exige la coopération du Burundi car elle indique « l’avoir autorisée le 25 octobre avant la date à laquelle le retrait a pris effet.» Cette obligation de coopérer dure aussi longtemps que l’enquête sera en cours et s’applique à toute procédure résultant de celle-ci.
La procureure indique qu’elle ne va pas se limiter aux incidents et crimes décrits dans la décision. Sur la base des éléments de preuve, elle va élargir son enquête à d’autres crimes contre l’humanité ou au génocide et aux crimes de guerre, dès lors qu’elle reste dans les limites des paramètres de l’enquête telle qu’elle a été autorisée. Elle déplore l’inaction de Bujumbura. Par conséquent, il n’y a pas de conflit de compétence entre la Cour et le Burundi.
Fatou Bensouda assure qu’elle recueillera les éléments de preuve de façon indépendante, impartiale et objective.
L’enquête pourra durer aussi longtemps que nécessaire. Si des preuves suffisantes en matière de responsabilité pénale sont établies, le procureur demandera de délivrer soit des citations à comparaître soit des mandats d’arrêt aux personnes soupçonnées.
C’est un coup dur pour Bujumbura, qui pensait en avoir fini avec la CPI. Il se croyait à l’abri des poursuites depuis son retrait définitif le 27 octobre. Des manifestations de joie ont été organisées dans tout le pays, le pouvoir se félicitant du retrait de cette cour jugée « cet instrument impérialiste et corrompu.»
iwacu-burundi.org