juin
30
2016

Le blues des élèves du Lycée Notre Dame de la Sagesse en situation de handicap

Les élèves malvoyants et sourds-muets  des classes de 9ème et 10ème  au Lycée Notre Dame de la Sagesse de Gitega  ne savent plus à  quel saint se vouer. Faute du matériel  pédagogique adapté  à leur handicap et du personnel enseignant spécialisé, ils se demandent s’ils vont être orientés au cycle supérieur ou mettre à terme leur scolarité.

« Il nous faut des professeurs spécialisés  dans tous les domaines et non des encadreurs », souligne Emmanuel Sindayigaya atteint d’une cécité à 10ans.

 Le Lycée Notre Dame de la Sagesse de Gitega héberge 69 élèves  sourds-muets et aveugles ou malvoyants. Il est l’unique école secondaire  classique  du pays à avoir adopté  le programme d’éducation inclusive, il y’a 4ans.

« Il ne suffit pas de mettre dans la même classe un enfant valide et les sourds-muets ou aveugles  pour  que l’éducation soit inclusive. Il faut aussi des mesures d’accompagnement  et une adaptation du manuel scolaire », déplorent ces élèves. Ils estiment avoir été servis de  cobaye par le gouvernement.  Aujourd’hui, 25 élèves qui ont passé le test de fin du cycle inferieur sont désespérés. Pour cause, rien ne garanti s’ils pourront continuer leur scolarité. Jusqu’aujourd’hui, l’école n’a pas encore reçu des équipements adaptés à leur infirmité ni des professeurs spécialisés.  Ils se demandent comment ils vont étudier les cours scientifiques ou l’enseignement  supérieur des métiers dans les conditions présentes.  D’après  Donatien Niyonkuru, leur avenir est incertain.  

« Suivre les cours  en écoutant seulement  et prendre les notes quand les autres sont en train de réviser nous expose à un échec. Il fallait au moins que chacun d’entre nous ait son livre  adapté à son handicap ! »

 « Non seulement les encadreurs sont insuffisants mais aussi leur  capacité à nous expliquer tous les cours n’est pas satisfaisante malgré leur courage et leur souhait de nous voir réussir », a poursuivi son camarade de classe lui aussi malvoyant.  Quant  à Francine Niyonkuru,  les choses se sont compliquées  depuis qu’elle a été orientée à cette école. Avant, elle avait fait l école primaire au Centre Rumuri (centre spécialisé pour les aveuglés et malvoyants  de  Mushasha à Gitega).

 « Nous avions  le personnel enseignant et du matériel suffisants. En plus, tous les enfants étaient dans les mêmes conditions », précise-t-elle. Diane est malentendante. Traduite par son encadreur, elle fait savoir qu’elle est aussi à bout de souffle.

Ils ne sont pas les seuls à se plaindre

 Comme le souligne certains  professeurs, ce système  d’éducation inclusive   n’a pas été  bien  étudié.   « Ma conscience m’accuse d’être complice  de cette injustice faite à ces élèves. Ecrire au tableau noir ou expliquer une leçon  sachant que  certains  élèves ne le voient pas ou ne l’entendent pas m’affecte énormément », explique un professeur  de mathématique.

Ces difficultés rencontrées par ces élèves à handicap affectent  aussi les encadreurs qui suivent ces élèves matin et soir. Ils déplorent les conditions dans lesquelles ils travaillent alors qu’ils n’ont ni prime ni repos.  Ils sont  en tout 8(4pour les malvoyants et 4 interprètes pour les sourds- muets).  Comme l’indique  Blandine  Kanyana  l'encadreuse  interprète, elle doit  être présente en classe  et rester debout  durant toute la journée en suivant les leçons  quitte à  les expliquer après.

« Si rien n’est fait dans l’immédiat, les déficients visuels et les malentendants  ne pourront pas faire l’enseignement supérieur car je ne peux pas me targuer de  comprendre toutes les matières du supérieur ! »  Elle demande qu’il y’ait plus  des formations de mise à niveau et de nouveaux outils de travail. Le directeur de cette école  reconnaît  lui aussi que l’école est incapable à  donner un enseignement de qualité aux élèves à handicap.

« Je n’ai pas de solution à proposer,  je me contente d’espérer que le gouvernement va doubler d’efforts pour que l’éducation soit réellement inclusive », a indiqué  Abbé Elie Sakubu. Contacté, le directeur provincial de l’enseignement à Gitega  s’est refusé de  donner des éclaircissements arguant qu’il n’est pas apte à répondre à nos questions.

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