avr
10
2015

Les engrais subventionnés, un programme qui se cherche encore

Durant toutes les deux saisons culturales, les agriculteurs manquent souvent d’engrais subventionnés alors qu’ils avaient payé leurs commandes. Pour eux, le Programme national de subvention des engrais au Burundi (P.N.S.E.B) doit être révisé et accepter la concurrence des particuliers.

« J’ai 5 tickets de 125 000 Fbu. Je les ai payés depuis la saison culturale A. Pourtant, la saison dernière, j’ai semé les haricots dans la terre sans fumier», regrette Godefroid de la colline Nyakibingo en commune de Gitega. Cet homme en colère n’est pas le seul à se lamenter dans la province de Gitega. Il est avec des centaines qui n’ont pas reçu leurs commandes des engrais subventionnés. Jusqu’aujourd’hui, certains cultivateurs se plaignent de n’avoir pas été servis malgré la possession de bons de commande dûment reçus de la part de P.N.S.E.B. A chaque distribution, ils ne cessent pas de dénoncer des irrégularités qui se manifestent. « A chaque fois que nous demandons d’être régularisés, on nous dit que c’est pour demain et c’est toujours la même chose », a encore indiqué Godefroid.

Les réclamations ne sont pas seulement dans la commune de Gitega. Même dans les autres localités de la province, les agriculteurs demandent de réformer le circuit de distribution de ces engrais subventionnés.
« Je viens de la commune Giheta, nous sommes venus jusqu’ici pour savoir où sont retenues nos commandes. S’ils ne sont pas à mesure de nous les donner, qu’ils nous remboursent notre argent .Surtout qu’ils ne nous embêtent pas avec leurs promesses », clame Bernadette rencontrée devant le bureau de la D .P.A.E Gitega.

La fraude et la corruption des engrais s’installent

D’après des enquêtes menées auprès de la Brigade Spéciale anti-corruption pour la région
Centre-Est, 274 sacs des engrais subventionnés avaient été saisis au cours de la première phase de distribution seulement. Et dernièrement, un commerçant du nom de Désiré Bapfekurera alias Miburo a été attrapé avec
50 sacs. Selon ces sources, il avait l’intention de les acheminer en commune Mutaho de la province Gitega. Les engrais chimiques saisis sont distribués gratuitement aux associations d’agriculteurs et autres organisations qui s’attèlent au développement du secteur. Néanmoins beaucoup d’agriculteurs s’opposent à ces mesures de lutte
a pas encore une solution alternative à ce manque d’engrais pour les demandeurs ayant payé l’argent reconnu par le PNSEB. « Pouvez- vous empêcher à quelqu’un d’acheter un produit de la fraude quand il l’a manqué sur le marché légal ?», s’interroge Evariste Mahene .Ils demandent à la DPAE et PNSEB de trouver une solution de rechange et surtout d’urgence. Et de poursuivre : « Quand la distribution se fait au mois de mars, comment voulez-vous que nous fassions dans la mesure où les conditions climatiques ne sont plus les mêmes qu’avant ?»

Deux poids deux mesures

Dans la province de Muramvya frontalière avec celle de Gitega , cette question de manque d’engrais chimiques subventionnés n’est plus d’actualité. En plus des lots du Programme National de Subvention des Engrais au Burundi (P.N.S.E.B), cette denrée rare à Gitega est vendue sans se cacher. Que ce soit les engrais de type DAP, Urée, KCL ou NPK, ils sont disponibles dans les boutiques et les magasins. « Dans notre commune, ce problème de pénurie d’engrais n’existe pas. Pour ce qui est des engrais vendus sur le marché quand ils ne sont pas dans le lot des engrais subventionnés, ça ne nous concerne pas. Ce qui nous préoccupe le plus, c’est que les agriculteurs ne manquent pas des intrants »,a assuré Emmanuel Niyungeko

A part l’association TUBURA qui avait gagné le marché et honoré ses engagements, selon Emmanuel Niyungeko, les agriculteurs de Rutegama ont aussi bénéficié des engrais qui correspondent à leurs demandes. Pour ceux qui s’impliqueraient dans les fraudes de ces engrais subventionnés, les mesures sont claires : on confisque leurs marchandises et ils payent une amende suivant la quantité qu’ils ont en leur possession.
Le directeur provincial de l’agriculture et de l’élevage à Muramvya indique que la distribution des engrais subventionnés a été un succès dans sa province dès le début. Il ajoute en outre que les engrais subventionnés sont nettement différents de ceux qui sont vendus par les privés. D’après lui, dans la mesure où les agriculteurs ont reçu leurs commandes et qu’ils ne se plaignent pas, il n’est pas nécessaire de courir derrière les commerçants.
Quant à Prosper Dodiko directeur de la fertilisation des sols au ministère de l’Agriculture et de l’Elevage, les cultivateurs paient d’avance l’argent de l’engrais commandé par les privés suivant la demande formulée par la population. Les payements se font via la Poste. Il reconnaît que ses services ne savaient pas encore exactement où se situe le problème. Toutefois, il précise que les engrais commandés sont parfois en-deçà de la demande formulée par les cultivateurs et quelquefois la livraison s’effectue avec des retards.
Et de conclure : « Suite à toutes ses irrégularités, nous avons arrêté des mesures contraignantes pour ces commerçants qui ne respectent pas convenablement les clauses du contrat. Ceux qui ont jusqu’ici mal exécuté le contrat ne seront plus autorisés à soumissionner.»

Jean Noël MANIRAKIZA pour l’Agence Infos Grands Lacs
 

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