Libéralisation du commerce du sucre : entre satisfaction et inquiétude
Une ordonnance conjointe du ministère du Commerce et celui des Finances libéralise la commercialisation du sucre. Pour certains, c’est une mesure salutaire. Pour d’autres, il s’agit d’une mesure qui risque d’alimenter des spéculations sur ce produit devenu rare.
Le jeudi 8 août 2024, le gouvernement du Burundi a annoncé la libéralisation du commerce du sucre sur le territoire national. Il ressort d’une ordonnance conjointe sortie par le ministère des Finances, du Budget et de la Planification économique et celui du Commerce, du Transport, de l’Industrie et du Tourisme que « le coût du sucre produit localement ou importé est fixé en fonction du coût de production ou du coût d’importation ».
Aussi, l’ordonnance annule toutes les autorisations d’importation avec exonérations déjà octroyées aux importateurs du sucre. Ces derniers sont priés d’introduire une nouvelle demande selon les conditions qui seront fixées par le ministère ayant le commerce dans ses attributions.
L’ordonnance intervient au moment où le sucre est devenu une denrée rare qui alimente des spéculations autour d’elle. Certains Burundais ne se rappellent plus quand ils ont acheté le dernier kilo du sucre. Pour obtenir deux kilos, on doit faire la queue pendant des heures et quelques fois on rentre bredouille. Dans certains quartiers, la présentation d’un cahier de ménage et la preuve de participation aux travaux de développement communautaire est requise.
Cette décision est salutaire pour les uns. « La libéralisation du commerce du sucre est prometteuse car elle permet à tout opérateur économique capable d’importer ce produit de le faire. En ce qui concerne le prix de vente, l’opérateur peut se baser sur le prix d’achat et le prix de revient pour fixer le prix », se réjouit par exemple un commerçant au marché de Kamenge.
Pour d’autres, la décision est désolante car ce n’est pas la première fois que des tentatives pour augmenter la quantité du sucre sur le marché sont annoncées. Le manque de devises suscite également des inquiétudes. « Ces importateurs pourront le faire en francs burundais ? Les répercussions de la pénurie récurrente du sucre ont été si importantes. Nous vivons dans un désespoir sans précédent », se désole un habitant de la zone urbaine de Gihosha.
« La nouvelle ordonnance n’apportera pas de changements significatifs. C’est plutôt une libéralisation de la spéculation dans le commerce du sucre. Aucun espoir pour les consommateurs », commente un autre.
Alfred Ndikumana est un habitant de la zone urbaine de Bwiza, en mairie de Bujumbura. Il s’interroge sur le bienfait de cette mesure. « Est-ce que la libéralisation de la commercialisation du sucre est venue pour faciliter le consommateur ? Attendons pour voir ».
Un importateur rencontré est dubitatif. Il estime qu’il est très difficile d’importer le sucre sans exonérations avec le manque criant de devises. « Plus de 50% des importations sont assurés par le marché noir. A ce moment, le sucre arrive au marché à un coût élevé. Qui va se le permettre ? C’est problématique ».
D’après un autre importateur, le gouvernement veut échapper à sa responsabilité afin de la jeter sur les autres. Le sucre est un produit stratégique, dit-il, qui doit être géré avec efficacité. « Même aujourd’hui, un kilo de sucre peut se vendre à 8 000 FBu. Comment sera la situation avec ce manque de devises? Malheurs aux consommateurs car le commerçant doit avoir son profit ».
Tous les efforts pour l’extension et la modernisation de la Sosumo afin de booster la production de cette usine qui a diminué depuis des années n’ont pas abouti. La plus récente est le partenariat signé entre la Sosumo et la société ougandaise Sarrai Group. Ce partenariat est resté lettre morte.
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