Mairie de Bujumbura : Une distanciation physique entre les églises qui dérange
La séparation réglementaire entre les églises peine à se concrétiser. Dix-sept églises sont implantées sur un rayon de 2,5km dans quelques quartiers des zones Kamenge et Cibitoke. Le ministre en charge de l’Intérieur recommande aux gouverneurs de prendre des mesures à l’encontre des églises ne respectant pas la loi.
Dimanche 20 mars, 10h. Nous sommes à la jonction de la 13e avenue du quartier Mirango II de la zone Kamenge et de la route nationale Bujumbura-Bugarama (RN1). Nous empruntons la même avenue. A quelques 100m se trouve une chapelle de l’Eglise catholique. C’est dans la paroisse Kamenge.
Non loin de cette chapelle, à moins de 40m, est érigée « l’Eglise Baptiste de la Parole Vivante de Kamenge ». La prière est en cours. Chants et danses au rythme des tambours alternent. Les fidèles se font rarissimes.
De l’autre côté de la même chapelle, à 30m se trouve une autre église dénommée « Eglise Shamah Center ».
Selon les habitants rencontrés près de cette chapelle, ces églises ont été implantées plus tard après la construction de la chapelle. « Il y a interférence des voix et des chants, les jours de culte », déplorent-ils. Ils implorent l’administration locale de faire respecter la loi.
Sur la même avenue, à peu près à 100m, se trouve l’église des Jéhovah. Celle dénommée Fraternité Evangélique Christ d’Afrique du Burundi est implantée à 50m de celle des Jéhovah. A 100m se trouve l’église dénommée Word of Life Liberation Church. Elle a organisé une croisade. A proximité, certains enfants jouent au football, d’autres jouent aux billes.
Sept églises sont donc implantées sur un rayon de moins de 500m. Or, le ministère de l’Intérieur recommande qu’une église et une autre doivent être séparées par au moins 500m en milieu urbain et 1000m en milieu rural.
Vers la fin de l’avenue, à gauche, se trouve l’Eglise Baptiste et, à droite, il y a l’Eglise Méthodiste Libre au Burundi, paroisse Mirango II. A peu près 40m les séparent. C’est à cheval de la route pavée séparant les quartiers Teza et Mirango II, tous de la zone Kamenge. Il est 12h. La messe touche à sa fin pour l’église Baptiste. Les chrétiens reçoivent la bénédiction.
Cap sur le quartier Teza
La 13e avenue gouille de monde. Au bord de celle-ci, certains fabriquent des beignets. D’autres vendent divers produits vivriers. Les enfants jouent au football. Difficile de se frayer un passage.
Une église dénommée « Eglise du Christ Actes des Apôtres » se trouve sur la même avenue. Il est presque 12h30. La messe continue. A un jet de pierre se trouve celle dénommée « Communauté des Eglises du Christ pour les Héritiers de la Promesse ». Les fidèles rentrent un à un.
Selon la population environnante, c’est du tapage les jours du culte. « Nous ne nous reposons pas tranquillement les jours du culte. Les fidèles de ces églises séparées par au moins 20m font beaucoup de bruits », se lamente G.H. Il demande aux autorités habilitées de faire respecter la distance recommandée par le ministère de l’Intérieur.
En traversant le boulevard de l’Unité, c’est le quartier Twinyoni. Une seule église dénommée « Jésus Christ est le Seigneur Universel » est construite au bord de la 13e avenue.
Une implantation anarchique
Eglise « Communauté des Eglises du Christ pour les Héritiers de la Promesse » sise à la 13e avenue du quartier Twinyoni.
La distanciation physique entre les églises dans la zone Cibitoke dérange plus d’un. La situation est atypique à l’avenue dite dorsale séparant la zone de Cibitoke et celle de Kinama.
Sur cette avenue, 5 églises sont implantées sur une distance ne dépassant pas 250m. A peu près 20m séparent l’église du « MINEVA » et l’église Adventiste du 7e jour. Cette dernière se trouve à au moins 10m de celle dite « Burundi Assemblees of God’s Fellowship : Sinai Temple ». L’église de Pentecôte est à quelques 50m du Sinai Temple. Des églises qui cohabitent avec les habitations. Vers 13h pour trois églises la prière était en cours.
De la part des trois églises, l’on entend concomitamment à travers les haut-parleurs : « Alléluia, Yesu ashimwe!» (Alléluia, que Jésus soit loué !).
« C’est du brouhaha et de la cacophonie les dimanches. Le bruit des chants en provenance de ces églises casse nos tympans », se lamentent les riverains de cette avenue.
Ils pointent du doigt les administratifs à la base qui ne font pas respecter la distance réglementaire dans l’implantation des églises. « Les églises s’implantent au vu et au su des administratifs à la base mais ces derniers ne font rien pour que la loi soit respectée », déplorent ces habitants.
Contacté à propos de ces églises en situation irrégulière, Ernest Niyonzima se dit préoccupé par ces irrégularités : « Nous avons tenu des réunions de sensibilisation à l’endroit des responsables des églises afin qu’ils respectent la loi. Les mesures prises par le ministère de l’Intérieur et les sanctions y relatives seront strictement appliquées ».
Ngagara prend les devants
Dans la zone Ngagara de la commune Ntahangwa, les choses commencent à bouger. Trois églises en situation irrégulière ont été fermées. « Les responsables de ces églises n’ont pas voulu s’exécuter, malgré plusieurs mises en demeure. Nous avons appliqué ce que la loi nous autorise », a indiqué Frank Ernest Ntandikiye, chef de zone Ngagara.
L’église sise au quartier 7 dénommée « La Parole de Vie » est concernée par cette mesure de fermeture. Les fidèles pratiquent le culte dans une salle de réception. Cette dernière sert de bar, le soir.
L’église Trust Aunthatic Church du quartier 4. Les fidèles prient dans une salle de réception. Et l’église « Shalom Tabernacle » du quartier 9. Ils prient dans une école (CESCOM).
M. Ntandikiye exhorte les responsables de ces églises à construire leurs propres lieux de culte ou de signer un contrat définitif de location avec les propriétaires de ces salles.
Il fait savoir que la mesure va prochainement frapper les églises qui n’ont pas respecter la distanciation réglementaire.
Les habitants de ces quartiers poussent un ouf de soulagement : « Adieu les tapages diurnes de tous les dimanches.» Iwacu a essayé de contacter les responsables de ces églises, en vain.
Elles sont dans le collimateur
Gervais Ndirakobuca, ministre en charge de l’Intérieur, n’y va pas par quatre chemins. Dans une correspondance adressée aux gouverneurs de province, le 12 mars, il leur recommande de prendre des mesures à l’encontre des églises et confessions religieuses en situation irrégulière.
D’emblée, le ministre Ndirakobuca tient à rappeler les réunions tenues à Bugarama et Kayanza. Selon lui, au cours de ces dernières, il a été recommandé aux responsables des confessions religieuses de corriger toutes les irrégularités qui leur sont reprochées. Mais, déplore-t-il, la situation reste inchangée pour la plupart.
Gervais Ndirakobuca précise que l’administration sera obligée de prendre des mesures contraignantes pour décourager les responsables des confessions religieuses qui font la sourde oreille. Selon la correspondance, différentes sanctions et par catégories sont prévues, en l’occurrence les amendes ou la fermeture immédiate.
Il s’agit de la fermeture immédiate des églises fonctionnant sans agrément ou travaillant sous emprunt ou exerçant les cultes dans les salles de réception. Par ailleurs, pour les églises ne respectant pas la distanciation réglementaire, la plus récente doit s’implanter ailleurs.
Le ministre Ndirakobuca instruit l’inspecteur général de la police de prêter main forte à l’administration provinciale pour la mise en application de la mesure.
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