avr
09
2021

UE/Burundi : les politiques entre optimisme et fatalité

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Le ministre Albert Shingiro entouré de l’ambassadeur de l’UE, Claude Bochu, ainsi que les ambassadeurs de quatre pays de l’union des vingt-sept.

Ce vendredi 9 avril, est prévu le deuxième round des négociations entre l’Union européenne et le ministère des Affaires étrangères et de la Coopération. Dans le sillage de ce dialogue qui a repris depuis quelques mois, des politiques livrent leurs analyses et leurs attentes.

Tout commence le 13 janvier 2021. Des informations font état d’une rencontre d’experts techniciens de l’Union européenne et du ministère des Affaires étrangères. Selon nos sources, cette rencontre aurait eu pour objet la préparation d’une réunion entre le ministre Shingiro et les représentants de l’UE pour le mois de février. Contacté, le ministre Albert Shingiro confirme la tenue de cette rencontre. D’après lui, cet échange consistait en l’analyse des éléments qui seraient abordés au cours de la réunion de février. Le ministre ne donne pas d’amples détails mais affirme toutefois que la réunion sera l’occasion d’aborder la question de la levée des sanctions contre le Burundi.

Selon une source proche de ce dossier, les exigences du gouvernement burundais portaient principalement sur deux points : l’arrêt de l’application de l’article 96 de l’Accord de Cotonou et la levée des sanctions à l’encontre de certaines personnalités dont le ministre de l’Intérieur, Gervais Ndirakobuca.

Du côté de l’Union européenne, les préoccupations majeures tournaient autour de la liberté d’expression, le respect des libertés publiques, la lutte contre l’impunité, la bonne gouvernance, l’appui au secteur privé (climat des affaires), etc.

Selon la même source, par souci de pragmatisme, l’Union européenne se garderait dorénavant de trop insister sur la question du respect des droits de l’Homme dans ses entrevues avec les officiels burundais « pour ne pas saboter les efforts de reprise de la coopération directe ».

Toujours d’après cette source, le retrait du Burundi de l’agenda du Conseil de Sécurité et la levée des sanctions de la part de l’OIF auraient accéléré les choses. Elle a souligné également que la libération des quatre journalistes d’Iwacu entrait également dans le cadre de concessions faites par le gouvernement Ndayishimiye vis-à-vis de ses partenaires européens.

Des signaux positifs après quatre ans de tumultes

Depuis l’accession d’Evariste Ndayishimiye au pouvoir, les contacts se sont multipliés. Le 7 décembre 2020, le président Ndayishimiye a reçu en audience l’ambassadeur de l’Union Européenne au Burundi, Claude Bochu, en compagnie des ambassadeurs d’Allemagne, de Belgique et de France.

Manifestement ravi de cette rencontre, M. Bochu a parlé « d’un climat amical » qui a imprégné les échanges. Il a précisé avoir discuté avec le président des domaines prioritaires pour le chef de l’Etat : santé, éducation, lutte contre l’impunité, développement agricole, sécurité alimentaire, mais aussi création d’emplois. Claude Bochu a précisé que l’UE est disposée à soutenir le Burundi dans ces domaines.

Le 11 décembre, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, Albert Shingiro, a invité à déjeuner l’ambassadeur de l’Union européenne et tous les ambassadeurs des pays membres de l’UE présents au Burundi. C’est au cours de ce déjeuner qu’ont été mises en place les équipes d’experts de l’UE et du ministère des Affaires étrangères devant préparer une réunion entre le ministre Shingiro et l’Union européenne et ses Etats membres.

A l’occasion de son message de vœux pour le Nouvel an, l’Union des vingt-sept s’est félicitée « de la réciprocité dans le réchauffement des relations avec le Burundi ».  Et de souligner que l’UE et ses États membres ont fait à plusieurs reprises des gestes d’ouverture. Ce qui a abouti à la reprise de la coopération financière de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Elle s’est réjouie en outre, de voir que le Burundi n’est plus considéré comme “un facteur de risque sur le continent”, le Conseil de sécurité l’ayant retiré de son agenda, le 4 décembre.

Ainsi, l’UE et ses États membres saluent les priorités du président de la République Evariste Ndayishimiye. Et de promettre « une normalisation graduelle et complète des relations avec le Burundi ».

Le 2 février : discours de courtoisie qui cache mal les dissensions entre l’UE et le Burundi

Dans son allocution prononcée à cette occasion, le ministre Albert Shingiro a affirmé que cet échange arrivait au moment où la température dans les relations entre le Burundi et l’Union européenne et ses États membres « commence à remonter ».  « Nous sommes confiants que cette température atteindra le niveau normal de réchauffement au terme de ce dialogue que nous entamons aujourd’hui avec une détermination et des volontés partagées ».

Le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération a souligné qu’il faut se libérer du passé. « En tant que partenaires de longue date, nous devons éviter de rester prisonniers du passé pour pouvoir avancer ensemble dans une même vision et approche ».

Et de recommander l’accélération de ce processus de dialogue : « Nous n’avons pas le droit de traîner dans cet exercice de dialogue. Nous devons décoller nos pieds du sol et travailler d’arrache-pied afin de conclure ce dialogue dans les plus brefs délais. »

Pour le gouvernement, tout doit être fait pour atteindre des résultats rapidement. « Avancer, ce n’est pas regarder constamment en arrière, ou de graviter autour des mêmes points comme une poulie. Avancer signifie plutôt progresser, faire des pas en avant pour s’approcher du point d’achèvement ».

Et d’inviter ses partenaires européens à un jugement positif sur le bilan du gouvernement burundais : « Je vous invite à une lecture juste des efforts et avancées significatifs que le Burundi a déjà enregistrés dans tous les domaines de la vie nationale et de les apprécier à leur juste valeur »

Du côté de l’ambassade de l’UE au Burundi, c’est l’appel à un dialogue des petits pas qui fut lancé. Pour ce faire, Claude Bochu a cité Robert Louis Stevenson, poète et écrivain écossais : « L’essentiel est le cheminement » Pour M. Bochu, le cheminement est le leitmotiv des dialogues politiques. « C’est quelque chose qui existe dans une relation et les partenaires se voient et échangent sur des sujets divers. Donc, c’est ensemble qu’ils cheminent ».

https://www.iwacu-burundi.org/ue-burundi-les-politiques-entre-optimisme-...

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