Jan
06
2019

Burundi : Des bavures avant et après le référendum constitutionnel

Plus de 40 opposants arrêtés depuis décembre au Burundi. Un groupe parlementaire d'opposition burundais a dénoncé jeudi l'arrestation ces dernières semaines de plus de 40 de ses militants, auxquels le gouvernement reproche de militer pour non avant et après le référendum constitutionnel de mai dernier.

Avec ce référendum, les Burundais doivent approuver ou rejeter un projet de révision de la Constitution qui permettrait au président Pierre Nkurunziza, au pouvoir depuis 2005, de briguer à partir de 2020 deux mandats de sept ans.

Ce référendum était initialement prévu en février, mais il a été reporté "pour des raisons techniques" par la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), qui le prévoit maintenant en mai.

Le gouvernement a lancé le 12 décembre une "campagne d'explication" autour de la réforme constitutionnelle. Mais la campagne officielle ne commencera que deux semaines avant le référendum, et personne n'est donc encore autorisé à défendre ouvertement le oui ou le non.

“Mais depuis le 12 décembre, 42 militants du mouvement Amizero y'Abarundi et de l’Uprona, aile de l’opposition ont été arrêtés arbitrairement et emprisonnés sous l'accusation de faire campagne pour le non", a expliqué Félix Niyonkuru, Uproniste en exil, ancien premier secrétaire du parti UPRONA, section enseignement supérieur. Il s’exprime à partir de son exil au Rwanda voisin, depuis 2015, toujours à cause de ses opinions politiques de l’opposition et des publications sur sa page face-book.

"La plupart de ces militants ont été arrêtés uniquement parce qu'ils sont membres opoosant, sur simple soupçon", a-t-il ajouté.

Amizero y'Abarundi ("Espoir des Burundais") regroupait au départ les ailes historiques des ex-rebelles hutu des Forces nationales de libération (FNL), dirigées par Agathon Rwasa, et de l'ancien parti unique Uprona de Charles Nditije.

Il n'est plus composé aujourd'hui que de 25 députés FNL. M. Rwasa, qui s'était opposé à la candidature de M. Nkurunziza à un troisième mandat en avril 2015, à l'origine de l'actuelle crise politique, avait ensuite décidé de "jouer le jeu" du pouvoir pour tenter de débloquer la situation.

Il avait ainsi été élu vice-président de l'Assemblée nationale en juillet 2015, peu après la réélection de M. Nkurunziza. L'Uprona avait refusé de siéger à l'Assemblée.
M. Felix Niyonkuru a dénoncé "un deux poids-deux mesures flagrant" car dans le même temps, selon lui, les ministres et responsables du parti au pouvoir (CNDD-FDD) n'ont aucune hésitation à faire campagne pour le oui.

"Si un membre du gouvernement a fait campagne pour le oui, c'est une erreur qui va être corrigée", a affirmé à l'AFP Gaston Sindimwo, le premier vice-président burundais, non reconnu par Félix Niyonkuru et son hiérarchie jusqu’à Charles Nditije, lui même en exil pour ses opinions politique contre le parti au pouvoir.
Ancien président du parti Uprona, Nditije et Niyonkuru ont mené ensemble des manifestations d’abord à l’Université du Burundi puis dans d’autres quartiers de Bujumbura.

Mais "les opposants qui font campagne pour le non doivent être arrêtés car pour nous, ce sont des rebelles aux instructions du chef de l'État", a encore commenté Felix Niyonkuru, ancien haut cadre du parti Uprona, dans les Universités, pépinière de futurs cadres du pays.

Fervent défenseur de l'actuelle Constitution, M. Rwasa s'oppose lui aussi ouvertement au pouvoir en place. Il a ainsi dénoncé "une révision de la Constitution qui viole la Constitution".

"Le niveau d'intolérance, de privation et de violation des droits civils et des libertés politiques a atteint son paroxysme", a ainsi dénoncé dans un communiqué Amizero, qui a également déploré" la recrudescence de la violence verbale" à l'encontre de ses membres et de M. Rwasa.

Le 17 mai 2018, les Burundais se sont prononcé à 73,2 % en faveur d’un projet constitutionnel visant à renforcer les pouvoirs du président Pierre Nkurunziza et le rendant éligible pour deux autres septennats à partir de 2020. L’opposition conteste toutefois fortement la légitimité de ce référendum ainsi que les irrégularités qui l’ont marqué.