Rwanda-Musanze: La population réclame la révision de la catégorisation sociale
Tous les Rwandais sont catégorisés dans les classes sociales pour une planification économique efficiente. Cependant, à Musanze, un des districts de la province du nord du pays, la population se lamente que cette catégorisation ne tient pas de la réalité et exige qu’il y ait une révision. L’administration promet de corriger ces disparités.
“ Moi je suis inscrite dans la 3ème classe. Mais je suis démuni, sans même avoir le moindre petit bétail chez moi, et pire encore je suis une veuve” se lamente une femme, d’une soixantaine d’années rencontrée au centre de négoce du secteur Nkotsi.
Cette femme n’est pas la seule à émettre des défis sur cette question. Non loin d’elle se trouve un vieux, avec un chapeau sur la tête. Quand il a entendu que nous discutions sur le sujet des classes sociales, il s’est approché lentement, levant la main comme un écolier et a demandé la parole.
“Moi aussi je suis assigné dans la 3ème classe alors que je n’ai même pas un vélo chez moi. Il est vrai que je détiens une propriété foncière mais je pratique une agriculture de subsistance et non de marché. C’est dire que je suis dans la catégorie des riches qui sont propriétaires des voitures, ce qui n’est nullement pas le cas” laisse-t-il entendre.
Cette affaire de catégorisation en classes sociales ne hante pas seulement les personnes âgées de plus de 50 ans.
Alexis a deux enfants. “Pourquoi nous sommes comparés ou mis au même pied d’égalité à ceux qui vivent dans les grandes villes, alors que nous, nous menons une vie modeste ici chez nous dans les campagnes ?” s’interroge-t-il.
Comme cette catégorisation des classes sociales a d’énormes répercussions presque dans tous les domaines de la vie à savoir la carte mutuelle, l’éducation primaire, secondaire et universitaire, le programme d’octroi des vaches aux pauvres, la mutuelle de santé, et bien d’autres, ces gens regrettent qu’ils jouent perdants.
“La plupart d’entre nous devraient se retrouver dans la 1ère classe sociale ou du moins au niveau de la 2ème catégorie” disent-ils.
A la question de savoir le pourquoi de ces incohérences, ces gens sont unanimes que “l’administration locale au niveau des cellules et secteurs veulent montrer qu’il n’y a pas de pauvres ou vulnérables dans leurs circonscriptions et veulent s’attribuer la bonne note”.
Selon la politique administrative du gouvernement du Rwanda, cette catégorisation est d’une importance capitale pour la planification économique efficiente, basée sur les statistiques solides et vérifiées.
A croire cette politique nationale, c’est à base de ces données que sont construites les salles de classes, les centres de santé, les routes, les centres de négoces sans oublier les vaccinations des enfants et la prise en charge sociale de la population surtout les femmes enceintes, les plus âgées, les vulnérables et les enfants de moins de 5 ans.
La mairie de Musanze promet de tendre l’oreille à la population
En mi-février dernier, le ministre de l’administration locale (MINALOC) Shyaka Anastase a indiqué que le processus de renouvellement des catégories et classes sociales est lancé.
A Musanze, comme d’ailleurs dans tout le pays, le mot d’ordre semble être entendu. Les consultations au niveau des cellules et secteurs sont déjà en cours.
“Au cours de ces consultations et sensibilisations publiques, nous récoltons les avis et considérations du peuple, ce qui a bien marché et ce qui est à corriger, des ajouts et des critiques constructives” souligne Madame Marie Claire Uwamariya, adjointe du maire du district de Musanze en charge des affaires sociales. Elle recommande à la population de donner de vraies informations.
“La population est appelée aussi à donner leurs suggestions sur le nombre de catégories sociale: doivent-elles rester à 4 ou devons-nous les réduire?” ajoute Madame Uwamariya avant de promettre une rigueur, transparence et honnêteté dans ce travail qui est d’intérêt public.
“Toute réclamation ou insatisfaction de la part des habitants sera tenue en considération et examinée” conclut-elle.
Les catégories en vigueur pour le moment sont numérotées de 1 à 4 au lieu de porter des noms comme indigents, très pauvres, pauvres, moyennement riches, riches ou des richards.
Le plus souvent, la population rurale souhaite être classée dans la première catégorie pour bénéficier de la gratuité des services de santé et des programmes nationaux d’assistance publique.
La dernière catégorisation date de 2014. Selon le dernier rapport de 2016 fait par le Rwanda Governance Board RGB, une institution Rwandaise de la bonne Gouvernance, la classe sociale qui compte plus de personnes et la 3ème. On y retrouve plus de 1.2 millions de ménages soit plus de 5.7 millions de personnes.
Et, 45.7 % des Rwandais ne sont pas satisfaits par les classes sociales dans lesquelles ils sont assignés, selon toujours ce rapport.